A Condal, il n'est pas rare d'entendre les passionnés d'histoire évoquer le fait que, approximativement, la commune était aux siècles précédents partagée en trois zones. A l'est du village, les propriétés de la famille Puvis de Chavannes à Saint-Sulpice ; celle de la famille de Montessus du côté de Dommartin, à Villars-Chapelle ; à l'ouest la famille de Chaignon qui possède toujours le château visible au bourg. Historiquement, la seigneurie de Condal appartenait aux moines de Gigny qui la vendirent en 1693 à un dénommé Gaspard Trébillet, avocat à Saint-Amour. Ce sont ses descendants qui revendirent les terres en 1768 à Pierre de Chaignon, représentant la France en Valais Suisse. Comme me l'a rapporté Robert Michelin, historien bressan que l'on ne présente plus, il est dit "ministre du roi" au moment de l'achat. Cette famille originaire du Périgord s'installa en effet en Belgique, puis en Suisse, avant de revenir en France. Ses armes sont "d'azur au lion d'or, armé et lampassé de sable, tenant une épée d'argent, garnie d'or". La famille de Chaignon possédait environ 1/5ème de la commune, en terre, fermes (une dizaine semble-t-il) et des bois dont elle se sépara peu à peu. L'un de ses membres, le fils de Pierre, Maurice, fut maire de Condal de l'an 9 (1801) à sa mort en 1822 et conseiller général de 1816 à 1822. Les de Chaignon sont encore présents sur la commune de Condal et possèdent toujours le château et l'une des fermes restée dans le giron familial, la ferme dite "de la Motte" à quelques centaines de mètres. D'ailleurs, certains voient en ce lieu, situé sur une hauteur à deux pas de l'église, la "motte Morin", recensée dans divers ouvrages comme étant l'emplacement d'une motte féodale. Une autre motte a été recensée sur la commune, dans le secteur de Saint-Sulpice. Le château est situé au bourg et est visible depuis la route venant de Varennes-Saint-Sauveur. Si sa date de construction reste énigmatique, l'inventaire du canton le fait faussement dater du 19ème siècle : il est vrai que son architecture classique est trompeuse mais la tradition orale transmise au sein de la famille de Chaignon atteste que des travaux de reconstruction eurent lieu à la fin du 18ème siècle. Au-dessus de la porte d'entrée du château, une pierre porte d'ailleurs la date "1782" sculptée. La bâtisse est de plan simple, rectangulaire, rehaussée d'un étage et d'un second sous les combles. Des percements réguliers viennent rythmer les façades. Ces derniers sont au nombre de 48, un bon nombre ayant disparu du fait de l'impôt sur les portes et fenêtres établi en 1798 et supprimé en 1926.  Divers bâtiments entourent le château, autrefois plus nombreux et plus vastes. Sont à noter, la survivance de lieux assez intéressants : les vestiges du mur délimitant « la cour basse », un pigeonnier, une orangerie, un bassin servant à baigner les chevaux ou encore une glacière. En un endroit de la propriété privée, se cache en effet une ouverture aujourd'hui ensablée donnant accès à cette réserve de glace destinée sans doute à conserver des denrées en prolongeant la période hivernale. Des pains de glace étaient remontés par temps de gel de la pièce d'eau située en contrebas de la propriété. Au 18ème siècle, cette pièce d'eau alimentée par des sources revêtait une forme géométrique parfaite et côtoyait d'autres éléments naturels d'agréments : carrés potagers dits "du roi", labyrinthe, fontaines, etc. Aujourd'hui, elle est bordée d'arbres bicentenaires, notamment des cyprès chauves alors qu'un grand tulipier jouxte la maison. Ils y quelques années, existaient encore des arbres rares : robinier avec ses gousses  immenses et ses piquants impressionnants, cornouiller, liquidambar, frênes à feuilles rondes, marronniers à fleurs roses, bouquets de sapins argentés, platanes immenses, mûriers à vers à soie, tilleuls et les deux énormes marronniers d'Inde de part et d'autre du portail d'entrée. François de Chaignon évoque une « pratique » liée à ces marronniers et à la quête à l’église : « Dans le plateau de quête, le grand jeu des jeunes du moment, pendant la messe, était d’y placer des marrons en lieu et place des oboles. Le tout, sans se faire prendre. Les intéressés se reconnaitront… ». En empruntant  un chemin appelé "L'Avenue" débouchant sur la cour devançant la bâtisse  On découvre de part et d'autre deux bâtiments longilignes, (pour l'écurie des chevaux à droite et le garage à calèches à gauche et les boucles d'attache dans la cour intérieure), dont l'une des faces est bordée d'arcades. La charpente de l'un de ces bâtiments laisse supposer que leur construction est antérieure à la période de reconstruction du château. De là à penser que nous sommes face à d'anciens éléments de la propriété des moines de Gigny... Robert Michelin, en spécialiste de cette abbaye et de celle du Miroir toute proche, m'a à nouveau éclairée sur leur présence, leurs droits et les possibles édifices dont ils avaient l'utilisation, notamment d'éventuelles granges dîmières. Une grange dîmière (appelée également grange dîmeresse ou grange aux dîmes) était un bâtiment qui avait pour fonction, entre autres, de servir à entreposer la collecte de la dîme, impôt en nature, de l'ancien régime portant principalement sur les revenus agricoles collectés en faveur de l'Église catholique. Au moment de la vente de la seigneurie à Gaspard Trébillet en 1693, les moines percevaient à Condal 63 livres 5 sols en argent, du blé, de l'avoine, des gelines (des volailles), du vin. Après celle-ci, les moines conservèrent leurs dîmes, le patronage de la cure et le pré dit du Breuil. En fait, ils avaient les deux tiers des dîmes, le curé du lieu en ayant le troisième tiers : à Condal la dîme était levée à la 12ème gerbe (soit 1/12ème de la récolte) sur les gros blés (céréales principales). Les différents documents d'archives ne font pas mention de grange dîmière comme aurait pu le laisser entendre certains toponymes anciens mais évoquent par contre les hameaux de Condal et Villars Chapel ; les grangeries de Petit Condal, Escharlanges (notre Charlanche actuel) et une portion de Varignolles.

Vue aérienne du château il y a quelques décennies (Coll. part.)