Si l’armoire de mariage avait un statut particulier du fait de son mode d’acquisition et de l’entrée symbolique qu’elle faisait au sein du foyer, elle ne subissait pas de traitement de faveur quant à sa constitution, toujours à deux tons. En général, elle comportait dans sa partie inférieure un grand tiroir appelé « pantalonnière » ainsi que trois petits tiroirs placés sous le rayonnage central de l’armoire : on disait que celui du milieu, plus étroit que ses deux voisins, avait juste la taille pour accueillir un lingot ! Je doute fort que les armoires bressanes aient vu beaucoup de lingots d’or dans leur vie mais toujours est-il que le Bressan avait l’habitude de cacher ses économies et ses objets de valeurs dans ce petit tiroir ou dans la caisse de l’horloge.
L’armoire, mais aussi le vaisselier et l’horloge, en plus de leur décor naturel constitué des dessins chamarrés et ondoyants de la loupe, supportaient des décors sculptés, témoins de l’imagination et du talent des artisans bressans. Le plus souvent, le décor est figuratif et se rapporte au monde végétal : feuilles d’eau, épis de blé liés en gerbe, marguerites, glands… Plus stylisés sont le motif en fer à cheval ou en tête de chouette, variante de la coquille.
Les armoires de mariage ou de fiançailles possédaient un décor particulier, symbole de la nuptialité, à savoir des cœurs ou des corbeilles desquelles dépassent des bouquets végétaux et des fleurs, sculptés sur le fronton ou sur la traverse du meuble. Parfois, des dates, des initiales ou même des patronymes sont gravés dans des cartouches placés sur le trumeau et rappelle que telle armoire a été confectionnée telle année pour le mariage d’unetelle.   
Bien que d’apparence rustique, le mobilier bressan, par le savoir-faire et la créativité des différents artisans, reste pour tous les connaisseurs une réalisation de qualité adapté aux usages domestiques et familiers, à la spécificité des fermes bressanes et plus en amont, illustration de la diversité et des caractéristiques du milieu naturel bressan. Mais malgré son charme et ses qualités, le meuble bressan a souffert dans les années 1950-1960 de l’arrivée de nouveaux matériaux et d’un nouveau mode de vie : les fermes bressanes ont été délaissées pour de petits pavillons neufs et la belle armoire de famille a fait place à un buffet en formica et a été reléguée à l’écurie pour y entasser pots de peintures et outils.