La moisson était le travail ordinaire de tous paysans au mois de juillet : une coutume particulière la clôturait…
Bien avant le levé du soleil, on partait pour les champs : la chaleur étant harassante en cette période de l’année, le meilleur travail se faisait aux heures fraîches de la journée. Les moissonneurs s’alignaient dans la largeur du champ, chacun tenant un sillon ou une raie et poussant droit devant lui. Le conducteur de l’équipe prenait la tête entraînant la troupe qui le suivait. A l’arrière, un second surveillant pressait les traînards et s’assuraient que la besogne soit consciencieusement et méthodiquement exécutée. Les blés étaient sciés avec la faucille ou couchés à terre avec la faux ; à mesure qu’ils étaient abattus, on les dispersait en andains sur le sol ou en javelles.
Ce travail opiniâtre se poursuivait jusqu’à ce que tous les champs soient moissonnés. Alors on ramenait les dernières gerbes dans une charrette ornée de fleurs et de feuillage autour de laquelle chantaient les moissonneurs. Cette réjouissance s’appelait « tuer le chien » ou plus communément en Bresse louhannaise « prendre le renard ». Lucien Guillemaut rapporte cet usage qui se pratiquait en Bresse du temps où la moisson se faisait avec les faucilles ou les larges ‘’vollants’’. La dernière gerbe à enlever figurait le renard : on laissait à côté d’elle et debout une vingtaine d’épis (une troche) pour former la queue, et chaque moissonneur, se reculant de quinze à vingt pas, lançait sa faucille ou son vollant jusqu’à ce que la troche d’épis soit touchée. Celui qui l’abattait était proclamé vainqueur : c’est lui qui avait coupé la queue du renard. Des cris éclataient en son honneur et l’on rentrait à la ferme boire à sa santé.
Le dernier char de gerbes était orné de bouquets et de rubans sur un arbre solidement attaché à l’échelette, ou le plus souvent d’une croix confectionnée avec des épis et ornée de fleurs et de rubans entremêlés. Les moissonneurs et les moissonneuses, vieux et jeunes, garçons et filles, revenaient à la maison en chantant et en huchant. Puis, vers le soir, la croix que les jeunes promenaient encore processionnellement dans le village ou au hameau était plantée au sommet du toit de chaume. La fête se terminait par un repas copieux appelé le « repas du renard » et qui était suivi de danses.