En allant du bourg de Frontenaud au château des Crozes, à l’orée d’un bois dénommé la Grande Rippe mais également connu sous le nom de « Bois de la Dame » en souvenir de Madame de Lavérine, un panonceau un peu fatigué indique « Source Primerose »… Il faut alors s’enfoncer dans le bois et descendre en direction de la Gizia pour découvrir l’ancien emplacement de cette source. C’est Madame de Lavérine qui, souhaitant tirer profit de cette source naturelle, décida d’en lancer la commercialisation dans les années 1920. Elle fit construire un local abritant la dite source et un autre où était mise en bouteille cette eau. Aujourd’hui encore, ces édicules résistent (pour l’instant) au temps, bien qu’envahis par la végétation. Des aménagements furent également bâtis dont on aperçoit encore aujourd’hui les vestiges : murets, tables et bancs en pierre pour goûter directement aux bienfaits de l’eau et escalier bordé de deux grands arbres marquant l’entrée des lieux. Les bouteilles de l’eau de la source Primerose portaient de belles étiquettes en couleurs dont le slogan peut aujourd’hui faire sourire : « Primerose. La plus radio-active des eaux de tables »… Des résultats d’analyses figuraient également sur l’étiquette en plus de la localisation de la source : « Château des Crozes. Frontenaud (Saône-et-Loire) ». Si les témoignages rapportent que certaines des bouteilles de Primerose furent vendues jusqu’à Cannes, l’essentiel de la production s’écoulait à l’épicerie du village ainsi que, comme le mentionne le verso d’une carte postale de l’époque « dans les pharmacies et maisons d’alimentation de Louhans ». Cette même carte postale porte l’inscription : « Eau naturelle, légère, de goût agréable, reconstituante, digestive, stimulant toutes les fonctions de l’organisme ». La promotion de cette eau fut également faite par Madame de Lavérine à travers des affiches où le château des Crozes est également et exagérément mis en valeur par sa proximité avec les monts du Jura. Malgré cet investissement, la commercialisation de la source ne fit pas long feu puisque le 9 juin 1925 Madame de Lavérine dut comparaitre devant le Tribunal Correctionnel comme le rapportait à l’époque le journal L’Indépendant. En effet, Madame de Lavérine vendait l’eau de Primerose en tant qu’eau minérale mais sans acquitter les droits inhérents à cette catégorie d’eaux. Le rapport de l’audience note même que l’eau ne possède pas les propriétés thérapeutiques vantées et « qu’il est inexact de prétendre que la dite eau est destinée à remplacer les boissons hygiéniques, notamment les vins, mais qu’elle est plutôt destinée à être mélangée à ce dernier qu’à le remplacer » … Aujourd’hui, la source coule toujours au Bois de la Dame, aux Caravattes. Les installations sont toujours en place. On dit même qu’il n’y a pas si longtemps quelques Frontenaliens allaient y chercher leur eau… Et les amoureux de ce lieu espèrent pouvoir remettre en valeur ce petit site cher aux passionnés de patrimoine et d’histoire locale.
La source au temps de son fonctionnement (collection particulière).