Traditions bressanes
Bonjour veaux, vaches, cochons...
Si l’élevage de lapins se fait principalement à des fins d’autoconsommation et celui de la volaille à la vente, le reste du cheptel de la ferme était utilisé pour les activités agricoles – hormis le cas particulier du cochon comme nous le verrons plus tard.
Si l’on trouvait bien quelques chèvres par-ci, par-là, les moutons étaient quasiment inexistants en Bresse par traditions, ces derniers s’accommodant assez mal d’un climat humide. En revanche, bovins, porcs et parfois chevaux animaient les bâtiments d’hébergeage de la ferme bressane.
Les bovins étaient présents à la ferme pour la production laitière d’une part et pour le travail de labours d’autre part. On évalue le nombre de vaches laitières de cinq à huit et les bœufs à deux pour une ferme moyenne de dix à douze hectares. Les bœufs étaient dressés jeunes à tirer la charrue et à former des billons. Quand l’un d’une paire était vendu, un nouveau jeune bœuf était mis « en apprentissage » avec un plus expérimenté. Dans les exploitations où le cheptel était plus restreint, on pouvait rencontrer des « vaches savantes » effectuant le double emploi de productrices laitières et d’animal de trait.
Il était une fois un poulet de Bresse
Production rationnalisée nécessitant un travail méticuleux et soigné, l’élevage du poulet de Bresse passe par différentes phases et différentes personnes.
Avant toute chose, tous les poulets de Bresse sont issus du centre de sélection de Béchanne, à Saint-Etienne-du-Bois dans l’Ain. Il sélectionne des reproducteurs sains et homogènes d’après des critères tels que la finesse du squelette, la viabilité, la rusticité et bien sûr les pattes bleues et le plumage blanc. Après la ponte, les œufs issus de Béchanne sont envoyés chez des accouveurs qui vendent ensuite aux éleveurs des poussins âgés d’un jour.
Chez l’éleveur, vont se succéder trois phases. Tout d’abord, de la naissance à son 35ème jour, le poussin est à l’abri dans une poussinière où il est nourri avec des aliments du commerce. Ensuite vient la période de liberté en parcours herbeux où le poulet trouve lui-même sa nourriture, le complément étant apporté comme nous l’avons déjà vu par du maïs et des produits laitiers.
Enfin, 8 à 15 jours avant l’abattage, le poulet est placé dans la pénombre en épinette, cage spéciale destinée à l’affinage de la volaille. Cette période d’inactivité permet aux graisses issues de l’alimentation de pénétrer dans les chairs, donnant ainsi à la viande son côté fondant et onctueux. Autrefois, en plus de la mise en épinette, les Bressanes employaient le gavage : deux fois par jour, les poulets ingurgitaient une pâtée composée de farine de maïs et de lait écrémé.
Enfin, à l’âge de quatre mois, le poulet est abattu pour être destiné à la vente, l’abattage s’effectuant soit chez l’éleveur s’il est équipé pour ce travail, soit chez en abattoir. Soit la volaille revient chez l’éleveur pour la vente soit elle passe par un volailler qui commercialisera en vente directe ou par le biais des détaillants ou des restaurateurs.
Lapins à manger, lapins à porter
Les animaux de la basse-cour n’étaient pas les seuls à retenir l’attention du fermier et de sa famille. En plus des poules, poulets, coqs, oies ou encore canards évoluant à la ferme, le Bressan élevait souvent quelques lapins.
Logés dans des clapiers et demandant peu de travail hormis l’alimentation en foin et autres fourrages, les lapins de la ferme passaient bien souvent « à la casserole » (dans tous les sens du terme) lors de repas de fêtes ou de banquets à l’occasion de la fête du village, d’un mariage, d’un baptême… La maîtresse de maison les apprêtait alors souvent en civet, en terrine, façon chasseur ou encore à la moutarde.
En plus de satisfaire l’estomac du paysan, le lapin satisfaisait aussi son porte-monnaie puisqu’une fois dépecé, la peau du lapin pouvait être revendue à un marchand de peaux de lapins.
Ce personnage, dont nous avons déjà eu l’occasion de parler il y a quelques mois, sillonnait villes et campagnes à la recherche de belles peaux de lapin qu’il achetait 15 à 25 anciens francs. D’où une grande précaution à apporter au moment du dépeçage effectué par le maître de maison afin de ne pas trouer ou abimer la peau : en attendant le passage du marchand de peaux de lapins, on faisait sécher la peau dans un endroit sec et froid.
Ces peaux, le « crieur de peaux de lapins » les revendait au chapelier qui utilisait le poil pour fabriquer des feutres résistants à la pluie. De nombreux lapins bressans ont ainsi pu ceindre le front de « Messieurs » de la ville…
L'AOC : la garantie d'une qualité et d'un savoir-faire
Avec l’instauration en 1957 d’une Appellation d’Origine Contrôlée, n’est pas « Volaille de Bresse » qui veut. Trois éléments participent à l’attribution de l’AOC et à l’appellation : la zone, la race et les conditions d’élevage.
L’aire d’élevage du poulet de Bresse constitue un territoire bien particulier délimité par une zone géographique couvrant 3 500 km2 répartis entre Saône-et-Loire, Ain et Jura, le climat et la nature du sol de ce terroir favorisant la constitution d’une volaille à l’ossature fine donc au pourcentage de chair plus important.
Concernant la race, des trois types originels, seule la race « Blanche de Bény » a été retenue, caractérisée par son plumage blanc, ses pattes bleues, sa crête rouge droite et bien dentelée pour le coq, penchée sur le côté pour la poule, sa peau fine…
Enfin, les méthodes d’élevage, très strictes, sont issues du savoir-faire traditionnel de l’aviculture bressane. Chaque individu évolue en liberté sur parcours herbeux avec au moins 10m2 par sujet ; l’alimentation est constituée uniquement de céréales et de produits laitiers (sont totalement exclus les médicaments, les granulées, le tourteau…) ; l’abattage se fait alors que le poulet a quatre mois minimum.
Toutes ses particularités, associées à des éleveurs très scrupuleux et attentionnés, font de la volaille de Bresse une viande de haute qualité reconnaissable entre toutes au goût mais aussi grâce à la bague posée par le producteur à la patte gauche de l’animal et portant le nom et l’adresse de l’éleveur, par le scellé tricolore apposé à la base du cou et par l’étiquette du CIVB.
Tous ces éléments garantissent au consommateur l’assurance de la qualité d’une volaille de Bresse AOC.