Traditions bressanes
Des provisions pour l'hiver...
Si la période hivernale était propice à la préparation du travail agricole pour l’année, elle l’était également pour la confection et la préparation de certains mets à conserver une partie de l’année.
C’est ainsi que l’on tuait le cochon, comme nous avons déjà eu l’occasion de l’évoquer, et que l’on préparait le « vin cuit ». Cette spécialité est avant tout propre à la partie sud de la Bresse bourguignonne (comme à Romenay ou à Varennes-Saint-Sauveur) et à la Bresse de l’Ain où il porte le nom de « paria ». Cette préparation était une sorte de confiture à base de poires (d’où peut-être le nom de « paria ») et de pommes, destinée à être mangée durant l’hiver, notamment avec les matefaims ou les gaufres de sarrasin.
Si une partie était mangée fraîche, une autre était conservée dans des pots en terre que l’on passait au four : une croûte se formait ainsi sur le dessus, assurant la conservation de cette préparation sucrée.
Le vin cuit était une méthode de consommation et de conservation des fruits issus du verger à l’image des pâtes de fruits qui firent leur apparition au 10ème siècle en Auvergne. Appelées « confiture sèche », les pâtes de fruits étaient tout autant un moyen de conserver les fruits de l’année que d’apporter aux hommes une source d’alimentation sucrée, la consommation du sucre dans les campagnes ne se généralisant qu’au 19ème siècle.
Corbeilles, paniers, vans...
Selon l’usage de la vannerie, le travail était plus ou moins fin : on prenait des osiers plus fins pour confectionner un panier à beurre ou à provisions que pour faire une corbeille à « catrouilles » !
Différentes techniques existent entre la vannerie spiralée, tressée, à brins cordés, à armature rigide, sur croisée rondes, fonds à l’anglaise, clôture en plein ou à jours… La technique utilisée par le Bressan pour la vannerie ordinaire était celle transmise de génération en génération, en regardant les hommes faire pendant la veillé, véritable lieu d’apprentissage et de perpétuation des traditions.
La technique la plus souvent reprise pour la fabrication d’une corbeille était de former un fond constitué de trois brins mis côte-à-côte et fendus en leur milieu dans lesquels étaient glissés quatre autres brins. Puis, c’est autour de ce croisillon que le fond puis la panse commençaient à prendre forme grâce aux montants. Cette technique s’apparente à la vannerie sur croisée ronde et clôture verticale mais bien souvent, les variantes techniques étaient l’aboutissement d’évolutions régionales issues de traditions locales.
Si le vannier d’aujourd’hui, artisan professionnel, utilise certains outils spécifiques (travail sur une sellette, nécessaire constitué de poinçons, sécateurs, battes, poids pour maintenir l’objet en place…), le paysan ne possédait bien souvent que son couteau « à tout-faire » ne le quittant jamais pour couper, tailler et former ses brins.
L'abattage des arbres
Nous avons déjà eu l’occasion de voir que l’une des occupations des hommes pendant l’hiver résidait en la coupe du bois de chauffage et de ménage. L’entretien des forêts passaient également par l’abattage de temps à autres de grands arbres constituant la futaie : trop vieux, gênants, on essayait d’en tirer le meilleur, un vieux bouleau par exemple finirait chez le sabotier.
L’outillage du paysan, s’il était moins étoffé que celui du bûcheron professionnel, n’était jamais négligé quant à l’aiguisage des lames. D’ailleurs tous les outils et accessoires à la ferme comme à la maison passaient à la « meule » afin de garder leur efficacité. Il incombait souvent aux enfants le rôle de tourner la manivelle de la meule lorsque le père ou le grand-père aiguisait une lame grâce au mouvement de la pierre que l’on prenait bien soin de garder humide.
Généralement, on abattait un arbre à l’aide du passe-partout : le tronc était sectionné dans sa partie inférieure et la souche restait en terre. Lorsque l’on voulait dessoucher ou profiter d’un maximum de bois (rien ne se perdait, du simple rameau à la racine), on pratiquait la « culée noire ». On « déterrait » en quelque sorte l’arbre en creusant autour de ses racines : grâce à un attelage, on tirait l’arbre afin qu’il se déracine et que le tronc reste entier.
Par opposition, l’abattage « classique » au-dessus du niveau du sol est dite à « culée blanche ». Un court film retraçant le mode d’opération de la culée noire est visible à l’Ecomusée de la Bresse bourguignonne et dans ses antennes.
La vannerie du quotidien
L’hiver est également l’occasion de confectionner toutes sortes de benons ou autres paniers à usage domestique ou agricole. La vannerie (c’est ainsi que l’on désigne la technique, pour ne pas dire l’art, de tresser des fibres végétales, ainsi que les objets réalisés ainsi) était un savoir-faire que les hommes pratiquaient principalement au cours des veillées et les jours de mauvais temps.
Auparavant, il avait fallu récolter la matière première nécessaire à la vannerie. On utilisait la paille pour la fabrication des corbeilles à faire lever le pain (les « benons ») mais aussi pour celle des ruches. Cette paille, habituellement de seigle, est travaillée en boudins ou « colombins » et donne des objets de forme plus ou moins circulaire. Mais les anciens parlent de « paille de bois » dont la récolte se faisait après une bonne gelée permettant un arrachage à la main plus aisé : en attendant d’être utilisée, elle était mise en fagots.
Les osiers (ou « villons ») étaient récoltés en période de « lune dure » afin de pouvoir se conserver. Cette expression de « lune dure », entendue enfant sans doute dans la bouche de mes grands-parents, m’intrigue aujourd’hui… S’agit-il de la phase décroissante de la Lune favorable à la récolte de végétaux que l’on souhaite durables ?...
« Pourquoi n’ai-je pas demandé le sens de cette locution ? » me dis-je en écrivant ces lignes… Tout simplement car je n’y ai pas pris attention sur le moment, comme c’est le cas de nombres de gestes et de mots. Bien que les livres soient des sources inépuisables de savoirs et de connaissances, ceux-ci me servent peu ici, mentionnant uniquement l’adage : « En lune dure rien ne pousse ni ne réussit ».
Rien ne vaut la mémoire lorsque l’histoire faut défaut… A vous chers lecteurs de m’éclairer…