Traditions bressanes
Les commerces et métiers d'autrefois
Si aujourd’hui, habitants, municipalités, communautés de communes ou autres se débattent pour maintenir un bureau de poste ou créer un point de vente multiservices, autrefois les boutiques et ateliers d’artisans foisonnaient. Pour exemple, ces cafés ou bistros de pays, déjà évoqués lorsque nous parlions des conscrits ou des fêtes patronales : dans la Grand-rue de Sainte-Croix, on ne comptait pas moins de cinq auberges, sans parler de ceux se trouvant dans les écarts (à la Gare, au Triangle…). Dans cette même commune, essayons d’énumérer, dans cet article et les suivants, les différentes échoppes susceptibles de croiser les chemins du voyageur ou du Bressan. Ces lieux, où l’on allait avant tout pour se procurer quelconque marchandise, constituaient également un endroit de sociabilité évidente. Pour les gens des hameaux, venir au bourg consistait en une visite hebdomadaire (parfois plus, parfois moins selon les familles et la distance à parcourir) au cours de laquelle on se tenait au courant des dernières nouvelles. Cependant, une distinction, voire un différend, existait entre « gens du bourg » et « gens des écarts » et se faisait sentir avant tout entre enfants à l’école mais quelquefois aussi à l’âge adulte puisque bien souvent les hameaux étaient peuplés par les paysans et les bourgs par les commerçants. Dans certaines communes, une différence quant aux modes de pensée apparaissait également : certains allant fidèlement à l’église et d’autres moins, certains dits «blancs » et d’autres « rosés » voire « rouges »… Mais malgré ces divergences, il était bien rare qu’elles gâchent à ce point la vie villageoise, au mieux elle faisait rire ou sourire et les uns comme les autres avaient toujours besoin de l’entraide de chacun pour vivre.
Les bourgs de Bresse, comme celui de Sainte-Croix, regorgeaient de petits commerces et autres ateliers d’artisans (collection privée).
Les peuples de la forêt
La plupart de nos forêts, au dire des anciens, étaient peuplées d’êtres merveilleux tels les fées. Dans la culture populaire, les fées ne sont pas des déesses vénérées mais plutôt des créatures intemporelles, belles et jeunes la plupart du temps. On redoutait naguère de traverser les bois où elles s’abritaient et attiraient les mortels et jetaient des sortilèges. D’autres étaient vieilles, laides mais inoffensives à l’image des « sauvageons » présentes dans la forêt de Jailloux en Franche-Comté.
Les récits parlent, au sujet des fées, de pureté et d’étrangeté mais également de sociabilité et de sensualité : les fées seraient-elles l’incarnation d’un désir inassouvi, d’une angoisse, d’un rêve ? Les créatures surnaturelles survivent souvent aux bouleversements culturels parce qu’elles permettent aux hommes d’exprimer l’indicible.
Certaines apparitions de la Vierge seraient-elles une réplique chrétienne aux manifestations des fées, jugées trop charnelles et ambiguës ? Dans la forêt de Chaux, près de Dôle, se dressent les « arbres à Vierge ». A l’intérieur des troncs, les moines creusèrent des niches où ils placèrent une statue de la Vierge. Une croyance très ancienne faisait de l’arbre un lien entre le monde des morts (par les racines), celui des hommes (le tronc) et celui des dieux (la ramure).
Mais les fées et la Vierge ne sont pas les seules créatures formant le peuple des forêts : amazones, banshies, centaures, dames blanches, dryades, farfadets, faunes et feux follets les accompagnent.
Commerces et métiers d'autrefois
Après avoir évoqué à plusieurs reprises dans différents articles certains métiers d’autrefois, essayons de nous rappeler les divers artisans et commerçants rythmant nos bourgs il y a près de 70 ou 80 ans…
> Commerces et Métiers d’autrefois…
> Entre cafés, auberges, pensions…de quoi manger et boire
> La « fée verte » et ses conséquences
> Des buvetiers aux bistrots
> Figures et symboles des cafés et bistrots : du percolateur au Scopitone…
> Bouchers des villes, bouchers des champs…
> Entre tradition et modernité
> Le bon pain de chez nous…
> De la cuisson domestique à l’achat chez le boulanger
> « Talemeliers » et Saint Honoré
> L’épicier : fabricant de bougies et présentoir à médicaments…
> A l’épicerie du village…
> Vers des boutiques spécialisées
> Du tabac à chiquer aux « cousues »
> Le « devanti » laisse la place au corset…
> Des chapeaux « en provenance directe de Paris » !...
> Beaux rubans et souliers…
> « Détachage et coup de fer à la minute ! »
> Des garçonnes au salon de coiffure !
> Souffrir pour être belle…
> Des commerces un peu plus rares…
> « Le p’tit oiseau va sortir !... »
> Entre vermifuge et pastilles pour la gorge…
> « Au temps qui passe… »
> Du côté des nourritures terrestres…
> Un commerce rien que pour les enfants !...
> Caramels à un franc et roudoudous…
> Le bruit du marteau sur l’enclume…
> Chez le forgeron guérisseur…
> Du berceau au cercueil
> Au « Répare tout »…
> Le bruit des meules et des rires
> Du grain à moudre et des meules à rhabiller…
> Moulins de Bresse
> Savoir « dire la terre »
> Histoires de familles…
> Du chirurgien-barbier au médecin
> La venue du médecin…juste avant celle du prêtre…
> Le prêtre, confident des âmes
> Le curé de campagne, témoin de la vie de ses paroissiens
> L’église, maison de Dieu et autres fonctions…
> Le maître d’école, avant et après 1905
> L’odeur de craie et d’encre…
> Des uniformes au village…
> Des postillons au sketch de Dany Boon…la Poste
> L’humanisation des chemins : les marchands ambulants
> Entre diseurs de prières et Bohémiens
> Rétameur, rémouleur et autres patis…
> « Peaux de lapins, pô, pô, pô de lapins »
> Bûcherons et scieurs de long
> « Singe », « renardier » et « belle-mère »
> La grande invention de Jules Jaluzot…
> On solde « Au Printemps » !...
La forêt inquiétante et magique
Sauvage et dangereuse, ou enchantée et bienveillante, la forêt est toujours profonde et étendue car elle symbolise l’espace non civilisé. C’est l’antithèse du champ qui figure l’espace humanisé par sa clôture, l’inconscient par opposition à la conscience.
La forêt figure en bonne place dans les contes et légendes de toutes les cultures sédentaires. C’est l’inconnu près de chez soi, la demeure du loup, de la sorcière ou de l’ogre. Cette popularité s’explique aisément : dans leur dynamique de défrichement, les cultivateurs sont des éradicateurs d’arbres, ils s’en sont fait des ennemis et craignent les racines et les branches qui agrippent et étouffent, ainsi que les voix qui murmurent et dans le bruissement des feuilles.
Or, pour le bois de chauffe, il a été nécessaire de conserver des espaces forestiers et de les fréquenter. Ces derniers sont situés loin des villages, à la périphérie des circonscriptions seigneuriales, si bien que les franges nomades de la population peuvent voyager au loin en suivant ces lisières forestières, sans jamais se rapprocher des habitations. C’est alors vers la forêt que la société sédentaire rejette certains de ses membres inquiétants comme, dans certaine région, les rebouteux. C’est aussi là que vont se retrouver brigands et hors-la-loi.
Dans les romans du Moyen-âge, la forêt est indissociable de l’aventure solitaire du chevalier. En chassant dans la forêt, « antimonde » sauvage livré aux puissances magiques, le chevalier y fait son apprentissage du courage et de la vertu. Pénétrer dans la forêt n’est pas un acte gratuit mais un rite d’initiation qui peut s’achever en une quête mystique.
Poètes et artistes ont loué la forêt comme étant un temple à part entière, rejoignant ainsi la tradition antique selon laquelle la fréquentation des forêts sacrées était interdite aux non-initiés. Même les initiés devaient respecter des dates d’ouverture précises, comme lors de la réunion des druides gaulois dans la forêt des Carnutes. Nous ne sommes pas loin des traditions japonaises qui font de la forêt l’espace sacré par excellence, le lieu où l’on adore moins le créateur que sa création.